C) Mythes et transformation des cyclones tropicaux

C1) Est-ce que ce sont les basses pressions au centre du cyclone qui provoquent l’onde de tempête ?
C2) Est-ce que les forces de frottement sur terre provoquent la mort des cyclones ?
C3) Est-ce que les cyclones de grande taille sont aussi les plus intenses ?
C4) Y-a-t-il déjà eu une tentative ou une expérience menée pour affaiblir un cyclone tropical ?
C5) Pourquoi n’essaye-t-on pas de détruire les cyclones :

  1. en les ensemençant avec de l’iodure d’argent ?
  2. en épandant une substance sur la surface de l’océan ?
  3. en les atomisant ?
  4. en ajoutant des substances capables d’absorber l’eau ?
  5. en refroidissant la surface de la mer avec des icebergs ou de l’eau du fond de l’océan ?
  6. en contrôlant leur énergie ?
  7. etc ... ?
C6) Pendant un cyclone doit-on ouvrir les fenêtres et portes situées sous le vent ?
C7) Doit-on mettre du ruban adhésif sur les fenêtres quand un cyclone menace ?

Sujet C1) Est-ce-que ce sont les basses pressions au centre du cyclone qui provoquent l´onde de tempête ?

Traduction de la contribution de Chris Landsea.

Rappel : la marée de tempête est le phénomène de l´onde de tempête auquel on rajoute le phénomène de la marée astronomique (sujet A6).


Non. Beaucoup de gens affirment que la baisse de pression au centre d´un cyclone permet à l´océan de s´élever, donc d´être la cause d´ondes de tempête destructrices quand le cyclone atterrit. Cependant cette élévation induite ne serait que de seulement 1 m pour un cyclone ayant une pression au centre de 900 hPa. La hauteur totale d´une onde de tempête pour un cyclone d´une telle intensité peut être de 6 à 10 m ou plus.

La plupart (>85%) des ondes de tempête sont causées par les vents qui poussent la surface de l´océan à l´avant du système du côté du demi-cercle dangereux (à droite pour l´hémisphère Nord et à gauche pour l´hémisphère Sud).

Le gradient de pression en surface (entre le centre du cyclone et son environnement) détermine la force du vent ; la pression centrale peut indirectement donner une indication sur la hauteur de l´onde de tempête, mais certainement pas d´une manière directe. Il faut aussi noter que les hauteurs des ondes de tempête sont dépendantes de la topographie côtière, de l´angle suivant lequel le cyclone touche la terre, de la vitesse de déplacement du cyclone et de la force du vent.


Sujet C2) Est-ce-que les forces de frottement sur terre provoquent la mort des cyclones ?

Des parties de cette section ont été écrites par Sim Aberson.


Non. Pendant l´atterrissage, l´accroissement des forces de frottement contribue - ce qui peut paraître quelque peu contradictoire - à la fois à la diminution des vents moyens et à l´augmentation de l´intensité des rafales (Powell and Houston 1996).
Les vents moyens (sur 10 min ou un intervalle de temps plus court) sont réduits par l´effet de freinage que produit une plus grande rugosité du sol (i.e. buissons, arbres et maisons sur terre, alors que l´océan est relativement lisse). Les rafales sont plus fortes parce-que la turbulence augmente et donne par à-coup des vents plus rapides à la surface pendant un court laps de temps (quelques secondes).

Cependant, quelques heures après qu´un cyclone a abordé la terre, il commence à s´affaiblir rapidement, non pas à cause du frottement, mais parce que l´océan ne lui fournit plus humidité et chaleur. Ce tarissement de la source d´humidité et de chaleur amenuise la capacité du cyclone à développer les nuages convectifs près de son centre. Sans cette convection, le système se comble rapidement.

Une ancienne simulation numérique (Tuleya and Kurihara 1978) a montré qu´un cyclone atterrissant sur une région très humide (principalement les marais) qui ne modifie donc pas les conditions d´évaporation en surface, peut même s´intensifier. Toutefois, une étude plus récente (Tuleya 1994) ayant un traitement plus réaliste des conditions de surface a montré que même sur une région marécageuse un cyclone s´affaiblirait en raison de sources de chaleur limitées.
En effet, cela a été observé en grandeur nature lorsque le cyclone Andrew a traversé les régions très humides des Everglades, Big Cypress et Corkscrew Swamp au sud-ouest de la Floride. Andrew s´est affaibli très rapidement : les vents maximum ont diminué d´environ 33% et la pression est remontée de 1 9 hPa (Powell and Houston 1996).

Sujet C3) Est-ce-que les cyclones de grande taille sont aussi les plus intenses ?

Traduction de la contribution de Chris Landsea.

Non. Il n´y a qu´une très petite corrélation entre l´intensité (mesurée par la force des vents moyens ou la pression au centre) et la dimension (mesurée par le rayon des vents de 30 nœuds [15 m/s, 55km/h, grand frais] ou le rayon de la première isobare fermée - la plus externe) (Weatherford and Gray 1988).

L ´ouragan Andrew, qui est un bon exemple de cyclone tropical très intense (922 hPa de pression au centre et 125 kt (moyennés sur 1 minute) de vents moyens quand il a touché la Floride), était aussi relativement petit (les vents de plus de 15 m/s (moyennés sur 1 minute) n´étaient observés que dans un rayon de 150 km autour du centre).

Weatherford and Gray (1988) ont aussi montré que les changements d´intensité et de dimension sont indépendants l´un de l´autre.

Sujet C4) Y-a-t-il déjà eu une tentative ou une expérience menée pour affaiblir un cyclone tropical ?

Traduction de la contribution de Chris Landsea.

Le gouvernement américain a déjà soutenu un projet de recherche sur les méthodes à envisager pour modifier les ouragans, le Project STORMFURY.
Pendant quelques deux décennies, la NOAA et son prédécesseur ont tenté d´affaiblir les ouragans en larguant de l´iodure d´argent - une substance efficace comme nucleus de glace - dans les bandes de pluie des systèmes.
Au cours des années STOMFURY, les scientifiques ont ensemencé les nuages des ouragans Esther (1961), Beulah (1963), Debbie (1969) et Ginger (1971). Ces expériences ont eu lieu en plein Océan Atlantique, loin de toute terre.
Ces ensemencements visaient les nuages convectifs juste à l´extérieur du mur de l´œil dans l´intention de former un autre anneau de nuages qui, espérait-on, entrerait en compétition avec le cycle naturel du système et l´affaiblirait.
L´idée était que l´iodure d´argent augmenterait l´activité orageuse au sein d´une bande pluie en forçant l´eau "super froide" (eau demeurée liquide à une température inférieure au point de congélation, 0°C) à devenir de la glace, libérant ainsi de la chaleur latente de fusion et aidant la bande de pluie à se développer au détriment du mur de l´œil.
Avec une convergence vers le mur de l´œil affaiblie, les vents violents du centre se seraient également quelque peu affaiblis.
Pour que cet ensemencement de nuages soit réussi, il faut que les nuages contiennent suffisamment d´eau "super froide". Idée élégante en soit, mais qui au final, comportait un défaut fatal.

Les observations effectuées dans les années 80 ont montré que la plupart des ouragans ne comportent pas assez d´eau "super froide" pour que l´expérience STORMFURY puisse fonctionner; la flottabilité dans la convection des ouragans est assez faible et de fait les mouvements ascendants, comparés à ceux que l´on pourrait observer au sein des super ou multi-cellules continentales des moyennes latitudes.
On a constaté en outre que les ouragans non ensemencés formaient des murs de l´œil externes, exactement le résultat escompté par les scientifiques de STORMFURY en ensemençant les ouragans. Ce phénomène fait qu´il était impossible d´établir la différence entre l´effet de l´ensemencement (si effet il y avait) et les modifications naturelles de l´ouragan. Les rares fois où ils ont ensemencé et constaté un affaiblissement étaient sans aucun doute dus à ce que l´on appelle désormais les "cycles de l´œil".
La nature a donc accompli ce que la NOAA espérait faire artificiellement. Pas étonnant que l´on ait considéré les toutes premières expériences comme des succès. Les résultats des expériences d´ensemencement n´étant pas concluants, STORMFURY a été abandonnée.

Un comité spécial de l´académie Nationale des Sciences a conclu qu´une compréhension plus complète des processus physiques inhérents aux ouragans était nécessaire avant d´entreprendre une quelconque autre expérience de modification.
De nos jours, les activités principales de la Division de Recherche sur les Ouragans (Hurricane Research Division - HRD) se focalisent sur une meilleure compréhension de la physique des ouragans, et sur l´amélioration des prévisions.

Pour en apprendre plus sur l´expérience STORMFURY, lire Willoughby et al. (1985). .

Sujet C5) Pourquoi n´essaye-t-on pas de détruire les cyclones :


1. en les ensemençant avec de l´iodure d´argent ? (Traduction de la contribution de Chris Landsea).


Depuis une vingtaine d´années, la NOAA a essayé d´affaiblir les ouragans en les ensemençant avec de l´iodure d´argent - une substance qui est un noyau de condensation efficace - dans les bandes nourricières des cyclones. L´idée était que l´iodure d´argent devait renforcer l´activité orageuse des bandes nourricières par refroidissement et congélation de l´eau, donc en libérant de la chaleur latente de fusion et provoquant ainsi le renforcement de ces bandes nuageuses loin du centre au détriment du mur de l'œil.
Une convergence affaiblie au niveau du mur de l´œil devait entraîner l´affaiblissement des vents forts résultants. L´idée est bonne, mais a un gros défaut : il n´y a pas énormément d´eau en surfusion disponible dans la convection associée à un cyclone - la poussée est assez faible et les courants ascendants sont de petite échelle comparés à ceux que l´on peut observer dans les cellules continentales des latitudes moyennes. Les quelques cyclones ensemencés qui ont vu une réduction de leur intensité étaient indubitablement ceux qui possédaient ce qui est maintenant appelé une "structure de murs de l´œil concentriques ".

Des murs de l'œil concentriques ne se voient que dans les cyclones intenses (vent > 50 m/s ou 100 kt). Quand les cyclones atteignent ce seuil d’intensité, ils ont en général - mais pas toujours - un mur de l’œil et un rayon de vents maximaux qui se réduit à un diamètre de 10 à 25 km. A ce moment, quelques bandes nuageuses spiralées peuvent s’organiser en un anneau qui va petit à petit entourer le premier mur de l’il et le priver de sa source d’humidité et de son impulsion. Pendant cette phase, le cyclone s’affaiblit (i.e. les vents maximaux diminuent et la pression centrale remonte). Finalement l’œil externe remplace complètement l’œil interne et la tempête peut reprendre de la vigueur et dans quelques cas dépasser l’intensité initiale. Ce phénomène s’est produit lors de l’ouragan Andrew (1992) avant qu’il ne touche Miami : il est devenu très intense, un mur externe s’est formé, cela a affaibli la tempête, et quand le mur interne a disparu le cyclone s’est intensifié de nouveau. Donc la nature a accompli ce que la NOAA avait espéré faire artificiellement. Sans aucun doute, les premières expériences sont apparues comme des succès.
Pour en savoir plus sur ce projet appelé "STORMFURY" lisez Willoughby et al. (1982).
Pour d’informations sur les murs de l’il concentriques lire Willoughby et al. (1982) et Willoughby (1990)..

2. en épandant une substance sur la surface de l´océan ? (Traduction de la contribution de Chris Landsea).


Afin de vérifier certaines hypothèses, il y a eu quelques travaux expérimentaux pour trouver des substances qui répandues sur la surface de l´océan auraient permis de produire une évaporation. Si cela avait fonctionné dans l´environnement du cyclone, il ne fait pas de doutes que cela aurait eu un effet modérateur sur l´intensité de la tempête tant elle a besoin d´énormes quantités d´évaporation océanique pour maintenir son activité. (Simpson and Simpson 1966).

Il a aussi été suggéré, il y a environ 20 ans (Gray et al. 1976), que l´utilisation du charbon (ou de la suie) pourrait être une bonne manière d´influer sur l´intensification des cyclones tropicaux.
L´idée était que l´on pourrait brûler une énorme quantité de pétrole lourd pour produire un grand nombre de particules de carbone à déverser dans la couche limite aux environs immédiats du cyclone. Ces particules de carbone noirs seraient alors une immense source de chaleur, par absorption de la radiation solaire, qui serait transférée directement à l´atmosphère.
Cela déclencherait l´activité orageuse en dehors du cœur du cyclone (de la même façon que dans le projet STORMFURY) et affaiblirait la convection du mur de l´œil. Cette idée n´a jamais était mise à exécution. Cependant, la difficulté de trouver une substance susceptible de rester sur des mers démontées, a provoqué l´abandon de cette idée.

3. en les atomisant ? (Traduction de la contribution de Chris Landsea).

A chaque saison cyclonique, il est suggéré que lon devrait simplement utiliser des armes nucléaires pour essayer de détruire les systèmes tropicaux. Mis à part le fait que cela pourrait ne rien changer aux systèmes, cette proposition néglige le problème des retombées radioactives qui, entraînées par les alizés, pourraient rapidement toucher les terres et causer de graves dégâts environnementaux. Inutile de dire que ce nest pas une bonne idée.

Maintenant voyons d'un point de vue scientifiquement rigoureux pourquoi cette solution ne serait pas une technique très efficace pour modifier les ouragans. La principale difficulté dans l'utilisation des explosifs pour modifier un ouragan réside dans la quantité dénergie que cela requiert. Un ouragan mature peut relâcher de l'énergie thermique à un taux de 5 à 20x1013 watts, et convertir moins de 10% de cette chaleur dans l'énergie mécanique des vents. L'énergie libérée est équivalente à une bombe nucléaire de 10 mégatonnes explosant toutes les 20 minutes. Selon le World Almanac de 1993, la totalité de la race humaine a utilisé 1013 watts en 1990, soit moins de 20% de la puissance dun ouragan.

Si on réfléchit en énergie mécanique, l'énergie à la disposition de l'humanité est plus proche de celle du système tropical, mais le fait de concentrer ne serait-ce que la moitié de cette énergie sur un lieu précis au milieu dun océan lointain serait inconcevable. Une interférence brutale avec les ouragans ne semble pas prometteuse.

De plus, une explosion, même une explosion nucléaire, produit une onde de choc qui se propage loin du lieu de l'explosion un peu plus rapidement que la vitesse du son. Un tel phénomène ne fait pas monter la pression sur un baromètre après le passage de l’onde de choc, car la pression barométrique mesure le poids de l'air au-dessus du sol. A une pression atmosphérique normale, il y a environ 10 tonnes d'air reposant sur chaque mètre carré de surface. Dans les plus intenses des ouragans, c'est 9 tonnes. Pour modifier un ouragan de catégorie 5 en un catégorie 2, il vous faudrait ajouter une demi-tonne d'air par mètre carré à l'intérieur de l'œil, soit un total d'un peu plus d'un demi-milliard (500 000 000) de tonnes pour un œil d’un rayon de 20 km. Il est difficile dimaginer un moyen pratique pour fournir autant d'air.

S’attaquer à de faibles ondes tropicales ou des dépressions avant que celles-ci ne deviennent des ouragans ne semble pas prometteur non plus. Environ 80 de ces perturbations se forment chaque année sur le bassin Atlantique, mais seulement 5 deviennent des ouragans, au cours d'une saison classique. Il est impossible de prévoir à l'avance celles qui vont vraiment se développer. Même si l'’énergie libérée au sein d'une perturbation tropicale n'était que 10% de celle libérée par un ouragan, c'est toujours beaucoup d'énergie au niveau mondial, ce qui obligerait l'éventuelle milice anti-ouragan à restreindre très souvent la consommation électrique de par le monde ...

4. en ajoutant des substances capables d´absorber l´eau ? (Traduction de la contribution de Hugh Willoughby).

"Dyn-O-Gel" est une poudre spéciale (produite par Dyn-O-Mat) qui absorbe de grandes quantités d´humidité et se transforme en gel visqueux. On a proposé de larguer de grandes quantités de cette substance dans les nuages des ouragans pour dissiper quelques-uns de ces nuages et par là aider à affaiblir ou détruire l´ouragan.
Au HRD, nous avons testé l´une des possibilités du "Dyn-O-Gel" d´affaiblir un ouragan par le biais du modèle numérique MM5. L´effet constaté était faible (~1m/s).
L´argument était que cette substance aurait rendue les gouttes de pluie moins aérodynamiques; elles seraient tombées plus lentement et auraient donc augmenté le poids de condensation, affaiblissant par là le mouvement ascendant au cœur du mur de l´œil.
Si en revanche on accroît la vitesse de chute des hydrométéores, le système s´intensifie (d´environ ~1m/s).
En ce qui concerne les tests numériques, "accroître" signifie doubler la vitesse de chute tandis que "baisser" signifie réduire la vitesse de chute de moitié. Cet effet est plus le plus important que l´on puisse espérer produire dans l´atmosphère réelle.

La conclusion que l´expérience menée avec du "Dyn-O-Gel" conduit en fait à "dissiper" les nuages pose un problème. Ont-ils observé des nuages non modifiés ?
Les cumuli isolés de Floride ont de courtes durées de vie, et ce sont justement ceux-là qu´un chercheur devrait logiquement choisir.

En admettant, pour le plaisir du débat, qu´ils aient vraiment un effet, les descriptions semblent plus cohérentes avec un accroissement de la vitesse de chute de l´hydrométéore et une augmentation de la coalescence, ce qui renforcerait un système, comme le confirment les résultats des modèles numériques, mais sans plus.
Si cette spéculation s´avère être correcte, "Dyn-O-Gel" pourrait être utile pour provoquer de la pluie pendant les périodes de sécheresse, à l´inverse de l´ensemencement glaciogénique qui (tout au moins sous les Tropiques) tendrait à rendre les jours de pluie encore plus pluvieux - si jamais il fait quelque chose.

Quoiqu´il en soit, un des plus grands problèmes serait qu´il faudrait une quantité énorme de cette poudre pour même espérer obtenir un effet.
2 cm de pluie tombant sur 1 km carré équivaudrait à 20000 tonnes d´eau. Au taux de 1 pour 2000 préconisé par l´entreprise "Dyn-O-Gel", chaque km carré nécessiterait 10 tonnes de cette substance visqueuse.
En prenant un œil de 20 km de diamètre, entouré d´un mur épais de 20 km, cela correspond à 3770 km carrés nécessitant environ 37700 tonnes de "Dyn-O-Gel".
Un avion de transport C-5A peut porter un chargement de 100 tonnes, ce qui signifie que traiter le mur de l´œil nécessite 377 sorties. Une réflectivité moyenne est typiquement de 40 dBZ dans un mur de l´œil, soit un taux de pluie de 1.3 cm/h.
Donc pour conserver l´impact du "Dyn-O-Gel" sur le mur de l´œil vous devriez expédier autant de "Dyn-O-Gel" toutes les 90 mn. Si on augmente la réflectivité à 43 dbZ, il faut le faire toutes les heures. (Si le mur de l´œil est de 10 km d´épaisseur à peine, on peut réduire les sorties à 157 toutes les 90 mn, à la réflectivité la plus basse).

5. en refroidissant la surface de la mer avec des icebergs ou de l´eau du fond de l´océan ? (Traduction de la contribution de Neal Dorst).

Comme les ouragans tirent leur énergie des eaux chaudes de l´océan, l´idée a germé de tracter des icebergs des zones polaires jusqu´aux tropiques afin de refroidir les températures de surface de la mer.
Dans le même ordre d´idée, d´autres ont suggéré de pomper de l´eau froide du fond des océans vers la surface grâce à des pipe-lines, ou de libérer des sacs d´eau froide.
Voyons un peu l´échelle de ce dont nous parlons. La région critique pour le transfert d´énergie serait le secteur sous ou près du mur de l´œil de l´ouragan.
Si le mur de l´œil est de 50 km de diamètre, cela correspond à une région de presque 4550 km carrés. Si de plus, le système se déplace à environ 15 km/h, il balaiera près de 18650 km carrés d´océan.
C´est beaucoup d´icebergs pour seulement 24 heures de la vie d´un cyclone.
Ajoutons à cela l´erreur de trajectoire qui est actuellement d´environ 150 km à 24 h d´échéance, et la région concernée passe à 38000 km carrés.
Pour la méthode de tractage de l´iceberg, il faut augmenter d´autant le délai de mise en œuvre (et donc l´incertitude et la région à refroidir) ou prendre le risque d´exposer vos remorqueurs à la tempête.
Pour la méthode des pipe-lines, il faut pré-positionner le système suivant toutes les trajectoires possibles du système. Juste pour la côte américaine entre le Cap Hatteras et Brownsville, cela signifie couvrir d´engins 850 000 km carrés de plancher océanique.
Pour finir, pensez aux créatures marines. Si vous refroidissez brutalement le couche de surface océanique (ou même la rendez fraîche temporairement), vous dégraderiez l´écologie de cette région et tueriez probablement la plupart de la vie aquatique.
Un ouragan est suffisamment dévastateur en soi pour ne pas en rajouter !

6. en contrôlant leur énergie ? (Traduction de la contribution de Neal Dorst).

Si quelqu´un connaît un moyen de contrôler cette énergie, la puissance est pour lui. Il pourrait gagner des millions de dollars et la reconnaissance de toute la population vivant sur le littoral.
Chaque dyne d´énergie récoltée serait autant d´énergie utilisée en moins à la destruction des arbres.
Le plus grand obstacle technique est que l´énergie des cyclones n´est pas de bonne qualité, dans le sens où elle est abondante mais répartie sur une surface gigantesque.
Pour être de bonne qualité, il faudrait qu´elle soit concentrée, et donc facile à récolter et à utiliser. Il faudrait un champ de plusieurs km carrés couvert d´éoliennes pour que cette énergie soit rentable, et prévoir d´être mobile pour pouvoir intercepter tous les systèmes en atterrissage, ou prendre en chasse ceux qui changent de direction.
Bien sûr, courir à droite et à gauche vous ferait perdre de l´énergie et perdre de l´argent par la même occasion.
Le même raisonnement est valable pour des turbines en mer, sauf qu´il faut penser au moyen de les amarrer solidement sans compromettre leur mobilité. Ce serait un problème technique assez lourd, sans oublier qu´il faudrait que les turbines puissent résister aux débris emportés par le vent, et transférer rapidement l´énergie récoltée.
Donc, une fois dressée la liste de vos spécifications techniques, vous feriez mieux de trouver rapidement un sponsor voire deux, capables de financer ces turbines renforcées et mobiles avant même que vous ne puissiez récolter votre premier erg.

7. etc ... ?

Beaucoup de techniques ont été envisagées au cours des années pour modifier les cyclones : ensemencer les nuages avec de l'iodure d'argent, refroidir l'océan avec de la substance cryogène ou des icebergs, modifier l'environnement du cyclone par absorption supplémentaire de radiation solaire grâce à des particules de carbone, pulvériser le cyclone avec des bombes hydogène ou l'emporter loin des côtes avec des ventilateurs géants. Aussi minutieusement argumentées soient-elles, ces suggestions partagent toutes le même défaut : elles pèchent à mesurer la taille et la puissance des cyclones tropicaux.
Par exemple, quand l'ouragan Andrew a touché le Sud de la Floride en 1992, l'œil et le mur de l'œil ont tout dévasté sur une fauchée de 30 km de large. La libération d'énergie thermique autour de l'œil a été 5000 fois la puissance généréve (électrique et thermique combinées) de la centrale nucléaire/usine électrique de Turkey Point au-dessus de laquelle le système est passé. L'énergie cinétique du vent momentané était équivalente à celle libérée par une ogive nucléaire. Peut-être que lorsque le temps viendra où les hommes et les femmes pourront voyager jusqu'aux étoiles à presque la vitesse de la lumière, nous aurons alors l'énergie nécessaire pour intervenir sur la dynamique des cyclones par la maniàre forte.

L'humain est habitué aux systèmes biologiques chimiquement complexes ou aux systèmes mécaniques artificiels qui représentent une faible quantité (aux normes géophysiques) d'énergie de haute qualité. Du fait que les cyclones soient chimiquement simple -air et vapeur d'eau-, l'introduction de catalyseurs n'est guère prometteuse. L'énergie impliquée dans la dynamique atmosphérique est de l'énergie thermique de basse qualité, mais la quantité mise en jeu est phénoménale en terme d'expérience humaine.

Attaquer les faibles ondes tropicales ou dépressions avant qu'elles n'aient l'opportunité de se développer en ouragans n'est guère prometteur non plus. On compte environ 80 de ces perturbations sur le bassin Atlantique chaque année, mais seulement 5 parviennent au stade d'ouragan au cours d'une année classique. Il n'est en aucun cas possible de prévoir à l'avance celles qui pourront se développer. Si l'énergie libérée dans une perturbation tropicale est seulement 10% celle d'un cyclone, cela représente toujours beaucoup de puissance.

Peut-être que la meilleure solution serait ne pas essayer de changer la structure ou de détruire les cyclones tropicaux, mais d´apprendre à coexister au mieux avec eux.
Depuis que nous savons que les régions côtières sont vulnérables aux tempêtes, il suffit de renforcer les normes de construction pour avoir des maisons qui résistent mieux aux cyclones. Les gens qui choisissent d´habiter dans ces zones doivent s´attendre à avoir une assurance cyclonique sur leurs biens onéreuse - pas à des taux exorbitants, mais qui reflète le risque de vivre dans une région vulnérable.
Les efforts pour éduquer la population pour une préparation efficace doivent se poursuivre. Aider les nations les plus pauvres dans leurs efforts à diminuer les risques peut également contribuer à sauver des vies. Pour finir nous devons poursuivre nos efforts pour mieux comprendre et observer les cyclones afin de plus précisément prévoir leur développement, leur intensification et leur trajectoire.

Sujet C6) Pendant un cyclone doit-on ouvrir les fenêtres et portes situées sous le vent ?

Traduction de la contribution de Chris Landsea.

Non ! Toutes les portes et fenêtres devraient être fermées (et les volets tirés) pendant toute la durée du cyclone. Les différences de pression entre l´intérieur de votre maison et l´exterieur pendant la tempête ne sont pas suffisantes pour causer une explosion de la maison. (Aucune maison n´est parfaitement étanche.).
Les vents dans un cyclone sont très turbulents et une fenêtre ou porte ouverte - même si c´est sous le vent - peut être une cible potentielle pour les débris. Toutes les fenêtres extérieures devraient être protégées par des panneau de bois ou des volets métalliques.

Sujet C7) Doit-on mettre du ruban adhésif sur les fenêtres quand un cyclone menace ?

Traduction de la contribution de Chris Landsea.

Non, c´est une perte de temps, d´énergie et de ruban adhésif. Celui-ci renforce peu les vitres et n´offre aucune protection contre les débris emportés par le vent. Une fois que le tempête est passée, vous passeriez un après-midi entier à essayer de gratter le vieil adhésif de vos fenêtres (en admettant qu´elles n´aient pas été brisées).
Si un avertissement est émis, il vaut mieux passer du temps à fermer les volets et renforcer les portes.